Un texte que mon père a écrit sur son blog, il ya pas longtemps:
Zen and the Art of Motorcycle Maintenance
Pirsig est généralement présenté comme un philosophe et écrivain américain, connu principalement pour son best-seller : « Zen and the Art of Motorcycle Maintenance » ZMM, publié en 1974. Son deuxième roman, Lila: An Inquiry into Morals a été publié en 1991.
(J’emploie le titre anglais, car difficilement traduisible. Dans la suite j’utiliserai l’abréviation ZMM. ZMM a été publié par William Morrow Publishers, après avoir été rejeté par 121 autres éditeurs)
Mais il faut s’intéresser de plus près à la biographie de Pirsig, car ses livres sont largement autobiographiques.
Qui est en effet réellement Robert Pirsig ?
Il y a le garçon de 9 ans avec un QI de 170 essayant de s’intégrer dans une école du Minnesota.
Il y a l’étudiant immature exclu, parce rentré trop tôt à l’université.
Il y a le paumé faisant la route dans le Montana
Il y a le GI de 18 ans en Corée, s’ouvrant à la philosophie orientale, et donnant des cours d’anglais
Il y a le passionné de motos, rédigeant des notices pour des revues techniques
Il y a le professeur d’écriture, radical dans sa recherche de la « Qualité », un autre mot pour la « Vérité » et « l’idée du Bien » platonicienne.
Il y a le mari dangereux condamné à se faire soigner par électrochocs pour tenter de le débarrasser de ses obsessions mortifères.
Il y a le père brisé tentant de renouer avec son fils Chris lors d’un voyage en moto
Il y a l’écrivain peinant pendant 5 ans et bouclant finalement son manuscrit en 2 mois dans un camping car
Il y a finalement l’auteur célèbre du « Zen and the Art of Motorcycle Maintenance » ZMM
Il y a le père brisé encore et toujours, à la suite de la mort son fils Chris, assassiné
Il y a enfin et pendant longtemps le marin se cachant et se réfugiant dans la réclusion de son bateau.
La Philosophie de Pirsig
J’avoue n’avoir pas compris grand-chose à la philosophie de Pirsig, je trouve même que ses interminables développements sur la « Qualité » et le Zen dont on ne peut rien dire, sont plutôt pénibles à lire et font partie de son côté pathologique. Je ne vois pas ce que cette quête de perfection apporte réellement à la philosophie.
Non, ce qui m’intéresse dans Pirsig, et ce qui est profondément humain, c’est qu’il mélange philosophie et histoire de sa propre vie. Il témoigne de son chautauka personnel. Avec le seul souci de retrouver la sérénité qu'il a perdue. Il veut comprendre ce qui, à un moment crucial de sa vie, l'a brusquement, un jour, rendu fou.
(Chautauka : « On appelait Chautauqua, autrefois, les spectacles ambulants présentés sous une tente, d'un bout à l'autre de l'Amérique, de cette Amérique où nous vivons. C'étaient des causeries populaires à l'ancienne mode, conçues pour édifier et divertir, pour élever l'esprit par la culture. »)
Zen and the Art of Motorcycle Maintenance (ZMM)
Roman philosophique, autobiographique, existentiel sur les souffrances d’un ancien professeur en quête d’un absolu mythique et indéfinissable, la « Qualité », interaction entre le sujet et l’objet.
C’est un livre sur le voyage et le vagabondage, la route et l’aventure, c’est un livre entre « Sur la route » de Jack Kerouack et « Easy Rider » de Dennis Hopper.
On apprend qu’il sort d’un hôpital psychiatrique où son ancienne personnalité (qu’il nomme Phèdre) a été détruite à coups d’électrochocs. Dans son ancienne vie, il était un professeur d’anglais et de rhétorique passionné de philosophie. Tout va basculer quand il va se lancer dans l’étude du concept de Qualité. A la suite de ses recherches il met en place un système philosophique qui divise la pensée humaine en deux types : romantique et classique. Surtout, il voit en la Qualité la force créatrice au cœur de toute chose et qui transcende la dualité traditionnelle entre sujet et objet. Cette quête de la Qualité va l’entraîner dans la folie.
Et d'autant plus qu'il est devenu Phèdre sans le vouloir, ce disciple de Socrate qui osait tenir tête à son maître. Il est le fantôme de Phèdre, créature hideuse qui l'habite et qui hante ses nuits. Sous sa tente, il se réveille en hurlant dans son sac de couchage. «Qui es-tu, Phèdre? Où es-tu? Je vais te tuer!» Il le hait, il essaie de l'étrangler, de lui tordre son cou visqueux et de voir enfin son visage... Quel visage? Le sien, bien sûr, puisqu'il est Phèdre, puisqu'il est cette créature haïssable.
«Papa! Papa! crie son petit garçon terrorisé et en larmes, tu as voulu me tuer. Pourquoi?» Le père répond: «Non, pas toi, pas toi, c'est juste un rêve, un cauchemar.» Le fils continue: «Comme quand tu étais derrière cette porte en verre? Dans ce cercueil que tu ne voulais pas ouvrir?» Etait-ce un souvenir de l'hôpital psychiatrique? Etait-ce encore un rêve? Un rêve qu'il n'avait jamais raconté à personne, qu'il avait d'ailleurs oublié. Comment son fils en avait-il connaissance?
Le pauvre garçon - Chris - a déjà subi, lui, les premiers symptômes d'une crise psychotique et bien sûr il déteste ce voyage exécrable !
Et le zen ? On y fait à peine quelques allusions, sans plus. « Les seules pensées zen que vous puissiez trouver en haut d'une montagne sont celles que vous avez apportées avec vous. »
Quant à l’entretien des motocyclettes, l'auteur essaie de montrer qu'il obéit aux mêmes principes philosophiques qui régissent toute activité humaine. « Un moteur de motocyclette obéit point par point aux lois de la raison; et une étude de l’art de l'entretien des motocyclettes, c’est, en miniature, une étude de l’art du raisonnement. »
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